Florence MONIQUET - Cadence de sacs

PATHEIN, ville en Birmanie; le long du fleuve, des hangars bleus. À l'intérieur, des femmes, des hommes, conditionnent le riz de la région.
Ils trient.
Ils chargent le riz dans des sacs.
La grâce se mêle à l'intensité des gestes.
Elles avancent inéluctablement, un sac, deux sacs sur la tête.
Le port reste altier et digne. Les démarches s’ajustent.
La cadence soutenue, précise et régulière, indispensable au travail collectif, crée un mouvement perpétuel.
Je me tourne vers ce monde du travail, ces invisibles, à la marge des sociétés.
Regards inexpressifs et profonds, égarés vers un ailleurs, dans l’oubli de leur être, pris par la tâche répétitive, signé par leur corps.
J'insiste encore.
Quelque chose se vit, se donne...
Quoi exactement, je n'en sais rien.
Je photographie en pointillé.
La chance est d'en savoir le moins possible, la langue est manquante, les repères chancellent.
Laisser une trace, conjurer la transparence...
Je repasse dans ma tête tous ces visages que j'ai rencontrés, l'accueil qu'ils m'ont donné, tant de sourires.
Que sont-ils devenus ? J'ai peur pour eux.